Journal de l'Atlantic Challenge

Journal de l'Atlantic

Vendredi 9 juillet 2004

Nous voilà arrivés à Fishguard... Et heureusement le soleil est revenu ce matin!
Nous sommes logés dans une grande tente au milieu du campement. Nous l'avons décorée d'un grand drapeau français comme l'avaient déjà fait les autres équipages. Nous vous enverrons des photos dès que possible.
Après avoir mis Fidélité à l'eau, nous avons fait un bon décrassage bienvenu avec essai d'homme à la mer. D'ailleurs c'est Pierre qui s'y colle (il plonge très bien malgré la froideur de l'eau). Nous avons aussi essayé de mettre le taillevent en "voile carrée", comme sur un drakkar. L'ambiance de la compétition est naissante, nous avons déjà rencontré quelques personnes. A bientôt. Pascale et Emmanuel.

Samedi 10 juillet 2004

C'est parti pour une nouvelle journée... Au programme, après réunion des chefs de bords et baptême de la Yole de Fishguard ('Cwch John Kerr'), utilisée par l'équipage Russe, nous avions l'ouverture de l'Atlantic Challenge après le repas : défilé des drapeau puis discours des pers responsables de ce meeting. Ensuite vint le temps de se diriger vers les yoles pour avironner nos deux miles, ceci constituant la première épreuve de l'Atlantic. Nous étions dans la poule 2, et nous affrontions donc les yoles des pays suivant : France (Volonté), Italie (Creuza de mä), Angleterre (Intégrité), Russie (Cwch John Kerr), Amérique (Loyauté). Au final, dans l'ordre : Anglais, Russie, Amérique, Italie, France (Fidélité), France (Volonté).
Un rapide changement de 4 membres de l'équipage pour se préparer à l'épreuve de l'homme a la mer. Nous avons rejoint la ligne de départ à la voile, et ceux qui étaient à quai nous ont regardé a la jumelle. Le départ fut lancé, nous sommes partis vent arrière puis au coup de klaxon Plouf a fait plouf. Les voiles ont été affalées, les avirons sortis et 'scie partout' pour aller a la pêche au Plouf. Une fois remonté a bord, nous avons renvoyés les voiles et avons passé la ligne d'arrive 5èmes, pour cause de non compréhension en regard de l'utilisation de seaux pour freiner le bateau.

Dimanche 11 juillet 2004

Nous avons débuté la journée par le slalom sans safran. Nous avons concouru contre les Italiens. Le slalom s'est particulièrement bien passé. Les Italiens étaient loin derrière. Au classement général de l'épreuve, nous sommes 6ème suivi de près par l'équipage de l'autre yole française, celle des Bretons, bien que nous ayons reçu une pénalité pour avoir franchi la ligne de départ trop tôt.
Juste après avoir remplacé quelques membres d'équipages, Fidélité s'est élancée pour le run de voile/aviron dans des conditions houleuses mais avec l'esprit serein. Notre yole est arrive la première à la première boue, pour virer plus facilement. Dans la précipitation les équipiers s'occupant de la misaine ont eu des difficultés à fermer les ferrures, et pour cause, le mat de misaine était monté à l'envers. De plus, un des cabillauds, servant à attacher l'écoute s'est cassé. Plusieurs yoles sont passées devant la notre et nous avons termine 5èmes de la course.
L'après-midi était consacré au transfert de sac : Jackstay Transfert. Laurent était fin près pour le lancement de la touline que devaient récupérer Emmanuel et Pierre pour transférer le sac de victuailles anglaises (lire ici: gâteaux anglais au goût de savon et chocolat).
Nous sommes passés en même temps que la yole russe et la yole danoise. Avec le matériel gracieusement prêtée par nos cousins canadiens (bout de 50m, poulie et sac), nous avons termine 2ème de l'épreuve sur 3. Finalement le classement nous a rajouté deux minutes de pénalités pour une sombre histoire de rangement d'avirons dans le bateau et une autre minute pour un noeud de cabestan soit disant mal réalisé alors qu'une fois l'épreuve finie le jury nous avait confirmé une bonne performance.
La soirée s'est terminée par la découverte d'un nouveau pub a Fishguard, le 'ship's in' ou l'ambiance festive de la chanson régnait. Tour à tour les Gallois habitués de ce fief et les équipiers de Fidélité chantaient leurs chansons de marin en se rafraîchissant d'excellente 'pint' de bière.

Lundi 12 juillet 2004

Après notre briefing habituel, nous partîmes pour l'épreuve de 'l'esprit'. Cette épreuve consiste en une sorte de melting-pot des différents équipages internationaux. De ce fait, chaque yole comprenait un équipage mixte ou l'Anglais était de rigueur... Ainsi les a prioris n'étaient plus de mise, les Anglais coopéraient avec les Français, les Russes avec les américains, même les Normands avec les Bretons... Sur Fidélité étaient restés Renaud, Pascale et François et ils ont reçu a bord 10 personnes de nationalités différentes. Compte tenu des conditions météorologiques, arrivés sur le lieu de l'épreuve, le comité a annulé la course. Nous avons continués à tirer des bords dans une mer très formée. Tout le monde fut heureux, bien que quelques estomacs ne purent supporter le dur traitement imposé par la houle Galloise. Les autres équipiers de Fidélité étaient repartis sur les yoles Russes, Américaines, Anglaises, Canadiennes... Au final, une bonne matinée.
Apres le maigre repas quotidien du midi, nous voilà repartis pour l'épreuve de la 'voile'. Faisant partie de la deuxième poule, nous avons concouru contre les Bretons, les Italiens, les Finlandais, les Américains et les Danois. Le parcours était le suivant : Départ annonce dix minutes avant ; signal du décompte des cinq minutes ; départ suivi d'un bord en 'travers' puis du même bord dans l'autre sens après virement de bouée ; virement puis long bord de 'largue' ; bord de 'près' pour remonter au vent ; puis bord de 'travers' en direction de la ligne d'arrivée. Nous finissons cinquièmes de notre poule après une régate d'une heure quarante cinq sans réel vent, la soufflante du matin s'étant rendormie.
Après la soupe de 18h, il y avait deux groupes de rock Anglais sous la tente des festivités. Ceci a permis de décompresser pour se préparer à la rude journée de mardi qui nous attendait avec ses 4 épreuves. Une autre partie de Fidélité a pourri les américains aux fléchettes dans un Pub de Goodwick, et sont revenus tête haute.

Mardi 13 juillet 2004

La yole était conçue pour le transfert d'officier, et c'est en hommage a sa fonction d'antan que nous avons effectué la yole du capitaine. Dans ce pays celte qui nous accueille, les personnages étaient des "Salem", c'est à dire des sorcières. Nous portions tous fièrement nos marinières ainsi que nos canotiers. Tous droits comme des i, nos 'laisse courir' en ont impressionne plus d'un. La sorcière était contente du trajet ainsi que le jury.
C'est dans l'après midi qu'ont eu lieu les 'run off' (c'est à dire la petite finale) pour les épreuves de l'homme à la mer et de la voile/aviron. Nous avons testé une nouvelle méthode pour l'homme à la mer, en se faisant freiner par deux seaux pour nous épargner une perte de temps en sciant. Au classement général, nous sommes 9èmes.
Malgré une 5ème place dans les run off de voile aviron, nous pouvons être fier d'avoir mis 2 longueurs dans la phase d'aviron sur les Bretons. Au final, ces derniers nous en ont mis 5 fois plus à la voile. Nous finissons 5èmes de l'épreuve, et au final 11èmes.
A terre, le jury nous attendait de pied ferme pour passer l'épreuve de matelotage. 13 membres ont été désignés pour travailler les noeuds, surliures et épissures. On se prend la collation de 18h30 et cette journée se termine par la révision de la navigation sur un petit air de rock et d'accordéon au milieu des ballons et des frisbees.

Mercredi 14 Juillet.

Ce matin, avait lieu une épreuve très redoutée des équipiers (à en croire les rires nerveux étouffés lors de la réunion matinale des chefs de bords lorsque le sujet tomba sur cette épreuve), c'est-à-dire, la navigation. Trois d'entre nous sont désignés comme navigateur, pour barrer une autre yole, effectuer des relèvements, des calculs de profondeur, de vitesse... pendant les autres réciproquement rament sur Fidélité sous le commandement d'une autre équipe.
Nous sommes jumelés avec Harmonie, la yole internationale, à bord de laquelle embarquent Solène, Renaud, et Pascale. Concentration et longueur de temps sont les points forts de l'épreuve, avec la sympathie des yoleurs d'Harmonie, malgré le vent et le courant.
Le travail sur carte est ensuite plus laborieux et ne peut-être achevé avant le run-off voile. Laissant notre travail en cours nous partons donc face à cette épreuve. Le parcours a été un peu modifié par rapport au parcours initial à cause du changement d'orientation du vent. Les finlandais restent à terre car leur mât de taillevent est cassé. Nous finissons 5èmes à cause de nos difficultés à remonter au vent, mais après une régate riche en sensations et en virements !
A notre retour, les trois navigateurs du matin repartent achever leur oeuvre, pour laquelle nous recevrons la 5ème place, grande et heureuse surprise ! (Harmonie arrive 6ème).
A terre, le reste de notre équipage a préparé, la fête du soir car 'Bastille Day' oblige, les français sont mis à l'honneur. Un béret, un jeu de ski sur les planches en bois et un grand tournoi de pétanque sont organisés. C'est une soirée très sympa même si les résultats de la captain's gig décevants (eu égard à notre prestation) viennent ternirent un peu le tableau.

Jeudi 15 Juillet.

Grande journée très attendue : LE BREAK ! Un peu de temps pour dormir le matin, sans réunion des chefs de bords à 8 h, ni épreuve.
Nous profitons tout de même de la matinée pour naviguer avec les Américains de la yole Loyauté avec qui nous serons pour l'épreuve de remorquage. Nous effectuons un entraînement studieux de remorquage voile et avirons... mais sous la pluie et contre un vent fort.
Nous pouvons enfin prendre un peu de temps pour visiter le pays au cours d'une sympathique promenade en minibus à travers les si petites routes galloises, jusqu'à St David où se trouvent une cathédrale et les ruines d'un monastère très caractéristiques des vagues d'évangélisation de la Grande Bretagne.
Les équipages sont à nouveau réunis en soirée pour un grand bal folk très animé.

Vendredi 16 Juillet.

La compétition reprend avec le Practical Challenge, c'est-à-dire l'épreuve surprise dont on ne sait rien d'autre que le départ à l'échouage sur la plage. Les instructions nous sont livrées dans une enveloppe :
Nous sommes en 1797, vous être naufragés depuis une semaine sur cette île. Vous n'avez pas mangé depuis une semaine, les hommes sont trop fatigués pour ramer. Vos mâts ont été cassés dans la tempête qui a causé le naufrage. Faites avec le matériel du bord un gréement pour rentrer chez vous.
Cette épreuve assez déroutante a conduit à la création de multiples gréements avec des avirons perchés en guise de mât seuls, ou croisés selon les cas, et les voiles hissés en tous sens même à la manière d'un drakkar. Un prix est attribué de manière autonome à certains équipages pour leur ingéniosité, avec en vainqueurs les danois pour la solidité de leurs avirons croisés au milieu de leur yole.
Faute de vent l'épreuve de remorquage est repoussée au lendemain. A la place a lieu les run-off et finale des 2 miles avirons. Nous sommes confrontés aux yoles internationale, danoise, finlandaise, italienne, et bretonne. A nouveau l'effort est intense. Nous sommes 5èmes de cette poule laissant derrière nous les bretons après une lutte féroce et acharnée. Les équipiers semblent avoir moins souffert que lors de la 1ère manche alors même que nous avons amélioré notre temps sur la distance de 3 minutes !
Une fois à terre, nous apprécions les derniers instants avec Solène, Renaud et Bérangère qui reprennent le bateau le soir même. Ce n'est qu'un au revoir...
Une autre soirée Folk finit de dévoiler les talents de danseurs de nombre de yoleurs.

Samedi 17 Juillet.

Petit pincement au coeur pour la dernière épreuve et dernières instructions précises du chef de bord : je fais trois voeux : battre les finlandais, et les italiens qui sont derrière nous pour éviter de redescendre dans le classement et éventuellement battre les bretons !
Voeux réalisés et sans effort car le vent a subitement tourné, obligeant les organisateurs à revoir le parcours pour pouvoir lancer le départ, chose impossible faute de temps... donc régate annulée.
Nous sommes heureux de rester à notre place dans le classement. De toute façon nous avions déjà apprécié les joies du remorquage lors de l'entraînement avec les américains.
Nous mettons alors les voiles pour une dernière navigation dans cette si jolie baie, et sommes comblés en apercevant au loin les facéties de quelques dauphins en pleine partie de chasse.
La remise des prix récompense la participation de tous les équipages à la beauté de l'évènement. Les anglais si forts chez eux reçoivent pour la première fois la coupe de l'Atlantic Challenge.
Le reste de l'après-midi les yoles défilent une à une pour être grutées. La mise en container des yoles d'outre-atlantique et du Danemark est une opération délicate mais achevée avec succès.
Dernière soirée ensemble avec remise de pris sous une note humoristique. Nous nous voyons remettre une boite de conservation des aliments, pour emmener nos provisions et éviter d'avoir faim le midi lorsque l'on est soumis au régime britannique !
Les échanges de tee-shirts et autres uniformes, parfois même sales, vont bon train. Au cours de la soirée il devient donc difficile de discerner l'équipe de chaque personne, tellement le mélange culturel s'est opéré dans une fusion multicolore.

Dimanche 18 Juillet.

L'heure du retour sonne, adieux aux amis de multiples nations (à dans deux ans à Gênes en Italie ?). Les kilomètres qui nous ramènent vers la France défilent... certains dorment, d'autres racontent quelques souvenirs comme autant de petits bilans personnels de cette semaine si particulière.
Un consensus apparaît dans toutes les têtes : quelques soient les résultats, nous sommes parvenus à mener ce projet à bien, dans le respect des équipiers et du bateau. Depuis le début de la préparation et jusqu'à son achèvement chacun a du mettre un peu du sien, chacun à sa hauteur : entre la réalisation du nouveau jeu d'aviron, la création du site, la conduite de la yole à gauche, les soirées de navigation et de matelotage et les entraînements sur l'eau,... et toutes ces petites choses invisibles mais indispensables. Un équipage d'amis s'est véritablement consolidé dans lequel chacun a pu apporter ses talents et acquérir une place... et si cet équipage sort renforcé de cet évènement c'est encore pour pouvoir progresser, et accueillir d'autres équipiers, pour faire connaître cette saveur si passionnante voire enivrante de la navigation sur yole.